Le 2 octobre 2025, l’Arabie saoudite a organisé un panel de haut niveau lors de la réunion des dirigeants de la Conférence sur la sécurité de Munich, dans l’ancienne ville d’al-Ula. Officiellement, il s’agissait de faire progresser la paix entre Israël et la Palestine, et l’événement a réuni des représentants saoudiens, français et palestiniens. Le ministre saoudien des Affaires étrangères, le prince Fayçal ben Farhan, était accompagné de son homologue français Jean-Noël Barrot, tandis que le Premier ministre palestinien Mohammad Mustafa participait en visioconférence. Les discussions ont porté sur un cessez-le-feu à Gaza, la reconnaissance de l’État palestinien et l’aide humanitaire.
À première vue, ce panel projetait l’image d’une Arabie saoudite artisan de paix, cherchant à mettre fin à l’un des conflits les plus longs et les plus violents au monde. Mais un examen attentif révèle une image totalement fausse. L’organisation de tels panels permet au royaume de redorer son image internationale, tout en détournant l’attention de ses propres violations massives des droits humains, de sa gouvernance autocratique et de son implication dans des conflits régionaux.
La réalité est bien différente — et montre clairement pourquoi l’Arabie saoudite doit être exclue de l’organisation du tournoi de football le plus emblématique au monde.
La tragédie de Gaza et la morale sélective de Riyad
Lors du panel, les responsables ont insisté sur l’aggravation de la crise humanitaire à Gaza. Depuis octobre 2023, les attaques israéliennes ont tué plus de 66 200 Palestiniens, en majorité des femmes et des enfants, laissant l’enclave invivable, ravagée par la famine et la maladie.
La reconnaissance par l’Arabie saoudite de la souffrance palestinienne peut sembler louable, mais elle est éclipsée par son propre bilan de morale sélective.
Riyad se vante de soutenir l’État palestinien, tout en entretenant en parallèle des relations clandestines et un rapprochement diplomatique avec Israël, facilités par les États-Unis. L’Arabie saoudite ne peut pas se présenter comme défenseur de la justice à l’extérieur alors qu’elle réprime les libertés fondamentales à l’intérieur et mène des politiques régionales destructrices.
Ce paradoxe révèle la véritable motivation de sa diplomatie : la gestion d’image. Tout comme elle accueille des négociations sur les droits humains, l’Arabie saoudite se prépare à accueillir la Coupe du Monde FIFA 2034, qu’elle considère comme le joyau de sa politique de sportswashing.
Le sportswashing et la Coupe du Monde FIFA 2034
Le sportswashing consiste à utiliser le sport pour détourner l’attention des violations des droits humains et du régime autoritaire. L’Arabie saoudite a déjà investi des milliards dans la Formule 1, la boxe, les spectacles de la WWE, le circuit de golf LIV, et le rachat de clubs de football comme Newcastle United.
Avec l’obtention de la Coupe du Monde 2034, Riyad a remporté son plus grand succès jusqu’à présent dans sa tentative de redorer son image mondiale.
Mais une question fondamentale se pose : la FIFA doit-elle permettre à un pays avec un tel bilan d’accueillir le plus grand événement sportif de la planète ?
- L’Arabie saoudite est l’un des pays les moins libres du monde : Freedom House lui attribue un score de 8/100, parmi les plus bas de la planète.
- Les droits des femmes restent restreints, les lois de tutelle limitant encore leur indépendance malgré des réformes superficielles.
- La dissidence est brutalement réprimée : des centaines d’activistes, de religieux et de journalistes croupissent en prison pour des actes pacifiques.
- Le royaume continue de pratiquer des exécutions de masse : en mars 2022, il a exécuté 81 hommes en un seul jour, la plus grande exécution collective depuis des décennies.
Ces faits ne peuvent être ignorés lorsqu’il s’agit de décider qui peut accueillir des événements internationaux. Après la Russie en 2018 et le Qatar en 2022, le cas de l’Arabie saoudite est encore plus alarmant.
L’hypocrisie au nom de la paix
En organisant des panels sur la Palestine et Gaza, Riyad tente de se positionner comme une autorité morale. Mais son propre passé sanglant dans la région ne peut être occulté.
Pendant des années, l’Arabie saoudite a mené une campagne militaire catastrophique au Yémen, où plus de 377 000 personnes ont péri, beaucoup de faim ou de maladies évitables causées par la guerre. Les avions saoudiens ont bombardé des écoles, des hôpitaux et des cibles civiles — des crimes de guerre documentés par l’ONU.
Aujourd’hui, le royaume veut se présenter comme médiateur de paix, alors que ses propres politiques ont provoqué une catastrophe humanitaire dans le pays voisin.
Cette hypocrisie est flagrante. Si ses dirigeants voulaient réellement la paix, ils commenceraient par réformer leur système, ouvrir les libertés politiques et assumer leurs responsabilités. Au lieu de cela, ils investissent des milliards dans des mégaprojets comme NEOM, dans des festivals de luxe, et désormais dans la Coupe du Monde FIFA — tandis que les militants pour la démocratie croupissent en prison.
Pourquoi la Coupe du Monde FIFA 2034 en Arabie saoudite doit être interdite
Le monde doit s’opposer à la normalisation du sportswashing. Supporters, joueurs et société civile peuvent faire la différence.
- Les campagnes de boycott contre la Coupe du Monde saoudienne de 2034 prennent déjà de l’ampleur.
- Des ONG comme Amnesty International ont dénoncé le bilan du royaume et mis en garde la FIFA contre toute complicité.
- Les sondages révèlent une prise de conscience croissante parmi les supporters : en Europe, une enquête de 2024 a montré que 62 % des fans s’opposent à l’accueil de la Coupe du Monde par des régimes autoritaires.
- Certains joueurs refusent déjà de participer à des compétitions soutenues par Riyad, invoquant des raisons morales.
La campagne doit s’intensifier. Comme l’Afrique du Sud fut exclue du sport international pendant l’apartheid, l’Arabie saoudite doit être tenue responsable par une isolation sportive, jusqu’à ce qu’elle mette en œuvre des réformes.
Dites non à l’Arabie saoudite 2034
Le panel sur Gaza lors de la Conférence de Munich a tenté de présenter une image diplomatique et pacifique du royaume, mais il ne s’agissait que d’une mise en scène. L’Arabie saoudite ne peut pas se cacher derrière un vernis humanitaire tout en restant l’un des régimes les plus autoritaires et répressifs au monde, utilisant le sport pour blanchir son image.
La Coupe du Monde FIFA n’est pas qu’un tournoi : elle incarne la solidarité internationale, la joie et la fierté. La confier à un régime qui tue ses dissidents, opprime les femmes, alimente les conflits régionaux et bafoue les libertés serait une trahison de l’esprit du football.